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Quoi écouter quand… rien à faire, t’arrives pas à dormir

13 mai 2020 by Isabelle Chelley

Cette nouvelle rubrique du blog remis en état est issu d’un intense brainstorming avec Benjamin Peurey. C’est lui qui se charge des illustrations et qui a eu l’idée de ce ping-pong : il dessine une situation, à moi de trouver l’album pour lui répondre. Dans la vraie vie, ce maniaque des disques est aussi auteur d’excellents recueils de nouvelles et parolier à ses heures. Oui, il est un peu agaçant.

Que faire quand même le fait de compter les mauvaises reprises de “Hallelujah” n’aide pas à trouver le sommeil ? Ecouter un disque, bien sûr, c’est même suggéré dans le titre de cette rubrique. Oui, mais pas n’importe lequel.

A 3h39 du matin, la tentation serait grande de se ruer sur une anthologie du death metal, histoire que PERSONNE ne dorme dans le quartier. Ou de transformer sa chambre en Studio 54 (ou Piaule 6m2, selon sa superficie) en mettant une bonne vieille compilation de disco, dans le vain espoir qu’imiter la choré des Bee Gees dans le clip de “Staying Alive” finira par avoir raison de nos forces…

Tout cela serait trop facile. Alors… Quoi écouter quand, rien à faire, pas possible de fermer l’œil ? C’est le moment idéal pour piocher “Sleepless Nights” de Gram Parsons dans sa discothèque.

Pour les cancres du fond qui disent “Gram qui ?”, présentation express du monsieur. Ce fils de bonne famille (et d’alcooliques notoires) se prend de passion pour la country lorsqu’il est à l’université et devient guitariste rythmique des Byrds au moment de “Sweetheart Of The Rodeo” puis fonde les Flying Burrito Brothers, groupe de country rock au succès critique inversement proportionnel à ses ventes d’albums.

Signes particuliers : il raffolait des poudres illégales qu’on s’injecte ou qu’on inhale et des costumes de Nudie’s, grand faiseur de tenues à sequins capables de transformer n’importe quel chanteur de country lambda en boule à facettes vivante (Non, tu poses cette compil’ de disco !) Et si sa vie a été relativement brève – il n’atteint même pas les 27 ans fatidiques et clichés – sa mort donne des idées à ses amis qui décident d’organiser une petite crémation party dans le désert de Joshua Tree et pour ce faire, volent son cercueil… Avec lui, mort, dedans. On savait s’amuser dans les seventies.

Fin de la parenthèse. Revenons à “Sleepless Nights”. On ne va pas se mentir. A la première écoute, on le classerait volontiers dans la catégorie des disques agréablement chiants – un peu mou par moments, mais assez gracieux pour ne jamais tomber des oreilles. A l’origine, il s’agit plus d’une sorte de créature de Frankenstein sur disque, assemblé à partir des dernières séances en studio de Parsons avec les Flying Burrito Brothers et d’autres avec Emmylou Harris, deux mois avant sa mort, pour son dernier album solo. Leurs trois duos sont parfaits. La chanson “Sleepless Nights” fait même vibrer mon petit cœur de pierre, avec ses paroles qui en vont un tantinet trop loin dans le registre larmoyant – mais c’est ça aussi la beauté de la country. (Il n’y a que là qu’on supplie Jolene de ne pas nous piquer notre mec au lieu d’aller lui péter les dents, non mais).

En revanche, il peut arriver que les Flying Burrito Brothers évoquent la spécialité tex-mex un peu lourdingue contenue dans leur nom. Leur reprise de “Honky Tonk Women” se traine tellement qu’on en arrive à se demander si elle ne dure pas bien plus que les quatre minutes et des poussières affichées au compteur. Et là, même après l’absorption massive de cafés ristretto, des soucis de digestion, des angoisses existentielles, un concert de marteau piqueur et une nuée de moustiques s’étant invités dans la chambre, il y a toutes les chances qu’on sombre dans le sommeil du juste…  Merci qui ?


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