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juin, 2014

  1. I’m not there

    juin 11, 2014 by Isabelle Chelley

    Un jour j’ai sorti un livre. Ce n’était pas le premier, mais j’y croyais un peu. Mon attachée de presse a été remerciée par la maison d’édition à peine un mois après, alors qu’elle faisait de l’excellent boulot. Le livre n’a eu quasiment aucune promo et est vite tombé aux oubliettes, malgré mes efforts. Je comptais dessus pour me sortir des galères des piges aléatoires, j’espérais décrocher un boulot correctement payé (oui, je suis une sale matérialiste, j’ai tendance à aimer recevoir des sous en échange de mon travail). Mais rien. Rien du tout. Six mois de boulot à la poubelle, en gros.

    Je me suis promis ce jour là que ce serait le dernier livre que j’écrirai. Jusqu’ici j’ai tenu ma promesse. Je me suis d’abord privée de mon activité favorite. Puis l’inspiration m’a désertée. Ou le goût d’écrire, je ne sais. J’écrivais tous les jours, de façon quasi compulsive depuis mes onze ans. Ça laisse un gros vide à combler. Je l’ignore comme je peux… Je suis très douée pour ignorer.

    Mais plus jamais je ne veux me remanger un échec comme celui-là. Mon reste d’amour propre et mon ego stupidement démesuré par rapport à mes compétences ne le supporteraient pas. J’ai participé depuis à des projets collectifs, je veux bien donner un coup de main, passer les plats, collaborer, mais c’est le maximum. Au-delà de cette limite, je prends la fuite.

    Depuis, je vois passer les bouquins des autres avec envie, c’est d’autant plus dur que je suis entourée de gens créatifs… De mon côté, je me suis persuadée que je ne suis pas créative. Une bonne exécutante, oui. Douée pour traduire les mots des autres, aussi. Pas pour écrire les miens. Je ne considère pas que mes articles soient de la création. Je retranscris ce qu’on me raconte, j’écoute, j’essaie de poser les bonnes questions, j’ajoute un peu de perspective. Mais je ne crée rien du tout.

    Oui, je sais, c’est paradoxal, vaguement débile et nombriliste d’écrire qu’on n’écrit plus. Je ne le fais pas pour qu’on me supplie de ne pas renoncer. Je n’ai jamais été du genre à annoncer que j’arrêtais tout avant de le faire, à partir en claquant la porte dans de grands effets de fumée sortant par les oreilles. Je suis déjà partie en fait et personne ne m’a vue sortir.

    C’est rare que j’écrive quelque chose d’aussi intime. Promis, je ne recommencerai plus.